Et si, cette fois, c’était la bonne ? Et si, après une odyssée éreintante, faite de vide et de lassitude, nous apercevions la lumière d’un phare ? On ose à peine y croire. La côte est peut-être encore loin. En mer, les distances sont parfois trompeuses. Est-ce le chant du retour ou nos oreilles trompées par le vent ?
Ô habitants des terres, nous attendons ces retrouvailles depuis si longtemps. Ô habitants des terres, laissez-nous accoster, laissez-nous un dock, une passerelle, une crique, une plage… Venez nous voir dans les cabarets et les tavernes, dans les rues et dans les champs. Nous vous offrirons nos trésors de pirate. Nous les avons préservés du sel, rien que pour vous.
Merci à ceux qui ont attrapé nos bouteilles à la mer. Merci à ceux qui nous attendent. Nous vous offrirons des soirées faites de feux et de frissons. Nous ferons tout pour ne pas vous décevoir. Vous nous avez beaucoup trop manqué.
Pour autant, nous nous méfions du chant des sirènes. Nous refusons de tomber de Charybde en Scylla. Nombreux sont ceux qui voudraient nous faire avaler de l’eau de mer. Nous faire revenir dans un monde fait de concurrence, d'hypocrisie, d'exploitation, d'orgueil et de déni.
Dans les cales, une colère gronde déjà. Dans chaque recoin des sept mers, des gens se battent. Nous recommencerons oui, mais nous ferons tout pour ne plus faire "comme avant". Cette folie n’est plus la nôtre. Elle est celle d’un pays dont les côtes se sont éloignées depuis longtemps. Il s’appelle "passé".